Lipatti sur...
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Les cours avec Mihail Jora
Les cours avec Mihail Jora
Décrits dans une lettre adressée à Miron Soarec le 24 décembre 1932 :
Maintenant je m'occupe de l'instrumentation, je lis des traités que je me suis procuré de Paris et je cherche à me familiariser au maximum avec la technique et les secrets de chaque instrument. Je serais heureux si je pouvais composer cette année un Concerto pour piano et orchestre. Pour l'instant, si je suis inspiré, je m'exercerai en composant une Suite pour petit orchestre, pour attaquer plus tard le genre de compositions pour grand orchestre.
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Dinu Lipatti sur sa participation au Concours International de Vienne, où il a reçu le 2e prix. Dans une autre lettre à Miron Soarec, le 2 juin 1933 :
Il y avait une agglomération terrible (20 candidats par jour). J'ai joué l'Adagio et les premières mesures de la Fugue, ensuite on m'a demandé d'interpréter un petit passage de la première partie de la Sonate de Chopin. J'ai eu un piano horrible, un vieux Blüthner ; cependant j'ai réussi, ainsi que Cuca Fotino [Maria Fotino, une autre élève de Florica Musicescu]. J'ai été le dernier et c'est peut-être pourquoi j'ai été un peu énervé. J'ai eu droit à 15 minutes seulement […].
Si tu avais assisté à ce concours, tu aurais ri pendant une semaine. Figure-toi que j'ai été arrêté au milieu de la pièce, justement quand je me sentais le plus à l'aise, pour qu'ils se contredisent sur mon programme ; et puis j'ai été autorisé à continuer par le son d'une cloche, comme au tribunal […]. Grâce à Dieu, nous nous en sommes sortis tous les deux, et nous espérons le faire jusqu'à la fin.
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Sur sa rencontre avec Paul Dukas, relatée dans une lettre à Mihail Jora, du 19 novembre 1934
Lors de la première leçon je lui ai joué la Suite Satrarii (Tsiganes). Il l'a trouvée très bien, à l'exception de quelques éléments. Il m'a dit que l'orchestration de la première partie est lourde, parce que j'ai trop utilisé les trombones ; après il m'a dit qu'il y a quelque chose qui se répète à chaque fois et que la forme ne tient pas.
La deuxième partie (Idylle) lui a semblé meilleure ; il a ajouté que la qualité de la matière est très bonne, mais qu'elle n'est pas toujours bien taillée.
C'est la 3e partie qu'il a aimée le plus. Il a dit qu'elle est très bien orchestrée et très bien construite. Ça a été la première leçon. Lors de la deuxième, je lui ai présentée la Sonatine. Il l'a beaucoup aimée, vraiment beaucoup ; il a trouvé qu'elle a une conception mature et une construction solide. C'est surtout la troisième variation (Andante) qui lui a semblé admirable. En tout cas, il l'a aimé plus que la Suite (ceci ne m'a pas empêché de l'envoyer à Bucarest, même si avec moins d'enthousiasme!).
Avant de l'envoyer j'ai revisité certains passages : dans l'Idylle, par exemple, j'ai parfois remplacé le fagot avec le piano et les passages des cordes, je les ai renforcés avec des souffleurs (bois). J'ai réfléchi à ce que je pourrais encore composer cette année, et je reste fixé sur une Sonate pour piano. J'en ai fait la suggestion au maître et il a consenti avec plaisir.
Selon lui, j'ai fini l'école et il n'a plus de choses à m'apprendre de ce point de vue. Ensuite il félicite mon professeur pour sa manière de m'avoir initié aux secrets de la composition. La seule chose qu'il pourra faire pour moi c'est de critiquer avec une extrême sévérité les œuvres que je lui présenterai. Et en ce qui concerne sa sévérité, croyez-moi qu'il ne se méprend pas sur l'usage de l'adjectif « extrême » !!
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Sur Nadia Boulanger, dans une lettre à Mihail Jora, du 26 janvier 1936
Je vois Nadia Boulanger deux fois par semaine à l'école et deux fois chez elle. J'aime beaucoup ces leçons, je ne laisse rien m'échapper. Elle est extraordinaire.
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Toujours sur Nadia Boulanger, dans une autre lettre, adressée à Florica Musicescu, le 24 mars 1936
Mademoiselle Boulanger est de plus en plus admirable ! Elle a dirigé l'autre jour l'Orchestre Philharmonique de Paris et a présenté des œuvres extraordinaires. Dans ces moments, j'ai très honnêtement éprouvé une révolte sourde contre tous les chefs-d'orchestres qui ont l'occasion de présenter des grandes œuvres comme ça, mais ne le font pas. Ils restent figés dans leur répertoire étroit de Bach à Debussy. Rien d'avant Bach, et rien de notre époque.
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Dans une autre lettre, adressée à Florica Musicescu, le 18 décembre 1935, il écrit sur sa famille :
Mon frère, passionné de cinéma, est vis-à-vis, dans la salle de Sèvres-Pathé et admire les films avec Laurel et Hardy. Il collectionne des photos d'artistes, mange beaucoup et veut maigrir. Ma mère est perpétuellement en mouvement : un moment elle est à la maison, le suivant elle est à Châtelet – pour acheter des billets de concert. Elle est partout au même instant. Moi je suis moins adroit pour faire de tels tours de force. Je suis assis au bureau et vous écris. Ensuite je jouerai du piano…
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La rencontre avec George Enescu à Paris est racontée dans une lettre à Florica Musicescu, le 19 octobre 1935
L'autre jour j'ai écrit quelques lignes au maître Enescu, lui demandant s'il pouvait me recevoir pour lui jouer la Sonate de Beethoven. Il a été très gentil et m'a accueilli hier...
Il m'a invité à m’asseoir au piano et j'ai commencé à jouer […]. Lui il dirigeait et me donnait de temps en temps des indications et moi, hypnotisé par la splendide interprétation du maître, j'avais l'impression de jouer une autre Sonate pour la première fois [...]. Quelle expressivité, quelle générosité dans chaque passage ! […] Hier j'ai assisté à l'une des plus belles leçons. Et le maître a été si bon ! Il m'a dit que je pourrais lui rendre visite autant de fois que je voudrais pour avoir des conseils sur l'interprétation ou sur la composition. […] Je profiterai de sa générosité pour lui jouer mon Concerto en Mi bémol. Quel miracle il va en faire de celui-là !
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La première parisienne de l'opéra Œdipe de George Enescu, racontée dans une lettre écrite à Florica Musicescu le 24 mars 1936
Œdipe ! Un immense monument dans l'histoire de la musique ! Que notre maître vive 100 ans pour que nous puissions nous réjouir toujours comme nous l'avons fait aujourd'hui, le soir de la première d’Œdipe.
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Sur l'art de diriger, dans une interview: "Parler à Dinu Lipatti" à Adriana Nicoară, Univers littéraires , Bucarest 1941.
Diriger a été l'un de mes grands rêve, que je n'ai pas pu accomplir parce que j'ai consacré tout mon temps au piano et à la composition. J'ai déjà beaucoup de mal à les équilibrer.
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Dans une lettre à Mihail Jora du 4 novembre 1943
À Lucerne j'ai eu le bonheur de rencontrer Edwin Fischer, dont l'immense personnalité m'a complètement conquis. Il a joué devant moi, moi j'ai joué devant lui et j'ai découvert qu'avoir passé quelques instants avec cet enthousiaste de la musique, a été pour moi une vraie bienfaisance. Avant de nous séparer, il m'a promis qu'il me recevrait à tout moment et qu'il est à ma disposition pour quelque question que ce soit.